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8 novembre 2009 7 08 /11 /novembre /2009 21:27
Ca y est, je deviens un de ces paysans partisans et râleurs....

Je perds toute mon objectivité au profit d'un esprit de révolté.....

Nous sommes producteurs de lait de brebis. A l'origine (il y a longtemps) ce lait servait à faire du Roquefort. Le "progrès" aidant, il a été possible de faire de plus en plus de lait avec de moins en moins de brebis. Et ce lait, de plus en plus nombreux a pu être transformé dans d'autres produits que le Roquefort, dont certains sont connus (quand vous mangerez de la "feta" Salakis", du fromage Lou Perac, vous penserez à moi, il y aura un bout de lait de chez nous !).

Cette diversification amène de nouveaux débouchés, un développement pour la région, le maintien d'une activité et d'un (beau) paysage...

Mais en ce moment ca grogne : les discussions du prix du lait 2009 se terminent, mais tout le monde n'est pas d'accord. L'industrie qui transforme propose une baisse de 5%, alors que les ventes ont régressé de seulement 2,5% en 2009.

La crise est passé par là, certes, mais la baisse parait disproportionnée... Et aboutit à une perte de 4500 € sur l'année en moyenne. Chez nous c'est plus proche des 6 000 €... Ca peut paraitre pas grand chose, mais chez nous cela fait quelques mois de salaires pour un associé.

Alors, du coup, on râle : piquets de grèves et grosse manif. Vendredi c'était donc ma première "manif paysanne".... C'est plus calme que des étudiants, mais ca a des tracteurs plus gros, je ne sais pas ce qui vaut le mieux....




Je me demande ce que ca va donner, surtout quand je vois des producteurs de lait de vache condamnés à vendre le lait en dessous de ce qu'il leur coûte à produire... Il va falloir trouver des solutions rapidement...


Dans un registre plus "bucolique" :


Ca y est ils sont là....


Les deux premiers agneaux, sont des filles... Ce sont 2 jumelles, pas très épaisses, mais ca devrait aller... On a d'ailleurs fait les présentations avec les doudous du petit dernier, à voir dans la rubrique "Quizz"...

Dans un registre plus "pragmatique" : je crois que je vais passer dans un tunnel.... La période de l'agnelage nécessite d'être toujours présent dans la bergerie. On va donc se relayer pour y être de jour.... Comme de nuit ! 

Ze crois que ze vais être un peu fatigué....

C'est une des périodes les plus fatigantes de l'année... Si on (Fred, les enfants et moi) sort de cette période pas trop usés, ce sera plutôt bon signe pour la suite....

En attendant, je vais me coucher, j'ai un agneau à moi dans le lit : il y a un âge où le loup fait très peur...
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commentaires

C
<br /> Punaise et nous qui voulions visiter les caves tranquillou en urbain touriste, on a été obligé de traverser une route dont l'enrobage avait gentiment était refait par la DDE locale à l'aide de<br /> fumier.<br /> Ensuite nous avons rencontré un de ces gentils employé de la DDE qui nous a expliqué qu'ils refusaient ce 5% tant qu'il ne serait pas descendu à 3%. Heureusement que tu es là pour nous éclairer,<br /> car faire une manif pour refuser 5% d'augmentation et demander 3, on n'y comprenait plus rien.<br /> Merci encore, et c'est très beau les caves, ils ne parlent pas du salakis.<br /> <br /> <br />
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K
<br /> Puis-je me permettre de faire ma "parisienne de base" et poser quelques questions (parfois volontairement) stupides afin de t'amener à éclaircir ton propos ? Bien sûr, tu n'es pas obligé de<br /> répondre là, maintenant, c'est une discussion qui peut prendre son temps, ça le mérite il me semble et comme dit si bien un de mes amis: "j'suis impatiente mais pas pressée" (enfin, lui, il parle<br /> au masculin bien sûr !)<br /> <br /> Alors d'abord, ça veut dire quoi "il a été possible de faire de plus en plus de lait avec de moins en moins de brebis". Je te laisse le loisir de nous rédiger un post spécial historique des<br /> "progrès" dont tu parles et qui a permis ce miracle parce que là, juste, on flippe !<br /> <br /> Ensuite, parlons de ce "prix du lait" si tu veux bien.<br /> "L'industrie qui transforme propose une baisse de 5%, alors que les ventes ont régressé de seulement 2,5% en 2009." Quel est le lien direct entre ces deux indicateurs ? Si c'est la demande qui<br /> baisse, ne serait-ce pas l'offre qui devrait être réajustée (à savoir plutôt que de baisser les prix, on produit moins de lait, bon, en même temps, je sais pas comment parce que j'imagine que même<br /> avec de très bons arguments, il doit être très difficile d'expliquer à une brebis qu'elle doit se mettre chômage technique, le temps que les choses s'arrangent). Parce que moi, voir des mecs qui<br /> ont répandu leur lait dans les champs y'a pas si longtemps, ça m'a encore un peu foutu en l'air je t'avouerai.<br /> <br /> Autre question du même coup pour tout bien recoller les morceaux: de quoi est constitué ce prix ? Des coûts d'exploitation, de celui de la transformation et de celui de la distribution, j'imagine,<br /> mais dans quelles proportions ?<br /> <br /> Et enfin, si cela vous impacte de 6000 euros (sur l'exploit où tu travailles si j'ai bien compris), je veux bien savoir comment que c'est-y possible une chose pareille et surtout que tu me dises si<br /> chaque maillon de la chaîne est impacté a proportion égale ? (en gros, le distributeur, au hasard, aura-t-il aussi "mal" que toi ?)<br /> <br /> Ensuite, si je voulais être tatillonne, je te demanderai si tu penses que tout les coûts d'exploitation qui font que tu doit vendre ton lait à un prix minimum pour pouvoir vivre modestement certes,<br /> mais décemment, te paraissent pertinents (là, fatalement, j'imagine qu'on va parler politique agricole commune et que tu pourras nous expliquer "comment ça marche" façon Michel Chevalet avec des<br /> gros graphiques en camembert ... euh ! en roquefort je voulais dire !!!!)<br /> <br /> Et puis aussi (car si on me permet de faire des commentaires, moi j'y vais franco tête de veau ... de brebis, pardon !) j'aimerais bien, puisque tu as le courage extraordinaire d'être ton propre<br /> média que tu ne cèdes pas trop facilement au jargon du journalisme à slogan et que tu évites de parler de "grogne" quand tu parles de vos actions. Vois-tu, là, on parle de la langue. Les mots ont<br /> souvent un sens précis et, employés "maltapropos", il arrive qu'ils véhiculent inconsciemment des messages. Exemple: "la grogne". Si je regarde l'étymologie de ce mot, ça vient de "groin" . Par<br /> extension "grogner" c'est émettre des sons plus ou moins articulés ... Pas terrible l'utilisation du langage des cochons (contre lesquels je n'ai rien, je le dis ici publiquement) pour revendiquer<br /> clairement au sujet des brebis ... ;-) non ?<br /> <br /> J'arrête là, tu as déjà matière à nous rédiger des tas d'articles dans une rubrique toute nouvelle qu'on pourrait baptiser "économie paysanne". En attendant, car nous attendrons puisque tu as<br /> d'autre chats (oups !) à fouetter, je te souhaite de bonnes nuits dans la paille près de tout tes nouveaux petits...<br /> <br /> k.<br /> <br /> <br />
Répondre
B
<br /> Salut k,<br /> <br /> bon je vais essayer de faire une réponse la plus complète possible après ce long silence. Je ne sais pas si elle sera vue, au besoin j'en parlerais dans mon prochain billet....<br /> <br /> Commençons pas le début, c'est à dire les explications sur "le progrès" :<br /> A la base, une brebis, c'est un herbivore, donc ca mange de l'herbe mais aussi des céréales. La brebis mange même plus que ça : des feuilles d'arbres ou de buissons par exemple.<br /> Jusqu'aux années 60-70, l'alimentation était principalement l'herbe broutée dans les prés, le foin (de l'herbe coupée, séchée au soleil puis récoltée), et toujours les céréales.<br /> A partir des années 70, les techniques de conservation "longue durée" de l'herbe sous forme un peu plus fraiche que le foin se sont développées : c'est l'ensilage. On coupe l'herbe au champ, on la<br /> laisse très peu sécher, et on la récolte pour la stocker en vrac, dans un milieu privé d'air. De cette façon, une fermentation est provoquée, qui permet de se rapprocher au maximum des valeurs<br /> nutritives de l'herbe fraiche. C'est un peu comme la choucroute en somme...<br /> Rien qu'avec ce nouvel aliment, il a été possible d'augmenter, dans certains cas de doubler, la production laitière. Rien de bien "diabolique" en somme : l'alimentation est toujours à base d'herbe,<br /> mais stockée sous une forme différente. J'ajoute que les céréales ont beaucoup progressé également : nous utilisons principalement le triticale et l'orge sur notre exploitation, mais on n'évite pas<br /> l'incontournable recours au tourteau de soja... Les protéines sont nécessaires à la production laitière et c'est toujours lui qui en amène le plus....<br /> Voilà pour "le progrès"<br /> <br /> Concernant le prix du lait, le lien entre les 2 indicateurs est assez simple : si les ventes baissent, les bénéfices des industriels baissent, donc ils baissent le prix qu'ils payent aux<br /> producteurs.... Là où nous avons râlé, c'est que la baisse qu'ils proposent, est supérieure à celle qu'ils supportent.... Depuis que j'ai posté ce billet, les choses ont évolué : nous n'aurons<br /> finalement qu'1% de baisse sur le prix du lait produit en 2008; ca valait le coup de râler finalement...<br /> Pour ce qui est d'ajuster la production, nous disposons déjà de mécanisme de régulation similaire aux quotas en vaches laitières. Sauf que nous, si on dépasse notre quota, on nous prend toujours le<br /> lait, sans amende, il sera quand même utilisé mais payé un peu moins cher. En vaches laitières, il vaut mieux jeter son lait, quand on a fait son quota, sinon l'amende coute plus cher que produire<br /> son lait... Les gars qui ont épandu leur lait dans les champs sont dans une situation que je n'aimerai pas vivre : le prix de vente de leur lait ne couvre pas le cout de fabrication; s'ils l'ont<br /> jeté, c'est pour faire comprendre au public qu'il ne perdait pas plus d'argent à le jeter qu'à le vendre. Je ne dis pas que je suis d'accord ou non avec eux, je comprends seulement que ce secteur<br /> agricole est dans un tel état de délabrement que les producteurs sont totalement désespérés. Je ne me vois pas jeter mon lait, à moins d'etre dans des conditions financières dramatiques.<br /> Ensuite, pour "recoller les morceaux" comme tu dis, concernant le prix du lait : dans notre secteur, les industriels (ceux qui transforment) et les agriculteurs (ceux qui produisent le lait) sont<br /> rassemblés dans la "confédération générales de producteurs et transformateurs de Roquefort". Dans cet organisme, les 2 types d'acteurs sont représentés avec chacun 50 % des voix. Le prix du lait<br /> est fixé en fonction des volumes de vente de produit (Roquefort, pérail, Ex-Féta salakis, fromage de cuisine) et de la répartition de ces ventes (le lait servant au Roquefort est mieux payé que<br /> celui servant à fabriquer du Salakis par exemple). Au début de la campagne de traite, un prix "de base" est calculé qui sera versé tous les mois. A la fin de la campagne, on fait les comptes et on<br /> ajuste pour que tout le monde récupère un bénéfice, ou supporte le déficit. Ces efforts sont répartis sur tous les producteurs, et, en général en partie également par les transformateurs. Tout ceci<br /> est décidé au sein de la confédération, ce qui nous assure (pour l'instant) un système assez équitable de paiement, que beaucoup d'éleveurs en vaches laitières nous envient.<br /> <br /> Concernant l'impact de 6 000 euros, ben il a finalement fortement diminué et c'est tant mieux, mais je ne pourrais pas te répondre avec des éléments chiffrés sur la répartition de l'impact tout le<br /> long de la filière, même si j'ai une petit idée là dessus. Les exemples du prix du jambon, du prix du boeuf sont assez éloquents pour ne pas imaginer la même chose pour d'autre produit.<br /> <br /> Pour la partie tatillonne, je t'avoue que j'aimerai autant en parler de vive voix avec toi : vu l'heure, je vais avoir du mal à me lancer dans l'historique de la Pac, et de l'évolution des couts<br /> d'exploitation.... C'est un sujet passionnant, mais Michel Chevalet est pas très en forme ce soir ;-). Je peux pas dire que les couts de production ne soient pas pertinents : nous gagnons en<br /> qualité sanitaire ce que nous perdons en simplicité du travail. Le fait d'être obligé de déclarer toutes les naissances des animaux, entrées, sorties du troupeau, rassure le consommateur, et donne<br /> un minimum de garantie, même si ca nous fait du boulot en plus.... Après le débat plus "politique", vient avec la question "A quoi servent les normes, si elles concernent seulement la France, ou<br /> l'Europe ? Comment être compétitif à plus grande échelle, quand nous devons respecter des normes, donc supporter des couts supplémentaires, que d'autres pays n'ont pas ?" Pour le coup, j'aurais<br /> quelques exemples, mais là ca sera long...<br /> <br /> Bon pis après, concernant les remarques de style, tu devrais te lancer dans une carrière de pigiste pour Télérama, tu as le ton qu'il faut pour la critique ;-) .... J'ai écrit tout ça sous le coup<br /> de "l'émotion", ca faisait assez journaliste non ?<br /> <br /> Je garde sous le coude une rubrique "économie paysanne", il y aurait beaucoup à dire, à débattre, il existe des sites exprès pour ça (parlonsagriculture.com en est un par exemple), et il y a tellement de tendances, que je vais essayer de bien murir mes arguments pour pouvoir<br /> les défendre quand je commencerai à en parler....<br /> <br /> Bon, pas besoin de compter les moutons ce soir, je devrais pouvoir roupiller facilement....<br /> <br /> Bonne nuit :-)<br /> <br /> <br />